Ce qui se trouve au-delà du Bingo à la mode Entourant le Synode sur la Synodalité

Tson dernier mois de janvier, dans un tweet largement commenté, la Conférence des Évêques catholiques des États-Unis a publié une image soulignant “Sept Attitudes pour Marcher sur le Chemin Synodal”, y compris “Perspectives innovantes”, “Inclusivité”, “Ouverture d’esprit”, “Écoute”, “Accompagnement”, “Coresponsabilité” et “Dialogue. »Plus de quelques personnes sur Twitter ont critiqué le tweet comme faisant la promotion de “mots à la mode”, et les réponses négatives ont conduit l’USCCB à fermer brièvement les réponses au tweet. Certains ont pris cette fermeture comme un signe que “l’Église de l’écoute” demandée par le tweet n’était en fait pas si ouverte à l’écoute.

L’alarme concernant une sorte de ”bingo à la mode » de la part de l’USCCB s’appuie sur les préoccupations précédemment exprimées concernant le Synode sur la synodalité. Certains critiques ont exprimé leur crainte que l’accent mis par le synode sur la “marche ensemble” ne conduise l’Église vers un accommodement avec des cultures laïques hostiles ou à l’érosion de l’enseignement de l’Église, tandis que d’autres soupçonnent que le processus d’écoute musellera en fait les voix contestataires et dissidentes.

À la lumière de ces préoccupations, il est frappant que le Pape François ait choisi de se concentrer sur le thème de l’écoute dans son message pour la 56ème Journée Mondiale des Communications Sociales. La diffusion annuelle de ces messages a commencé en 1967 et a été un effet direct du Concile Vatican II, dont le travail pour le renouveau de l’Église catholique est explicitement référencé comme motivation pour ce nouveau Synode sur la Synodalité. Dans le cadre de l’engagement de Vatican II avec la modernité, il a promulgué le texte Inter Mirifica, se concentrait spécifiquement sur les “communications sociales”, qui à l’époque étaient principalement rencontrées par la radio, la télévision et les journaux.

Dans cette veine, les papes passés ont surtout utilisé ces messages annuels pour répondre aux nouvelles opportunités ou aux nouveaux défis des technologies de communication. Le pape Benoît XVI, par exemple, a examiné des questions telles que le rôle des médias numériques dans l’éducation des enfants (2007) et pastorale (2010), ainsi que les possibilités de réseaux sociaux pour l’évangélisation (2013). Auparavant, le pape Jean-Paul II a publié des messages sur des technologies aussi variées que les ordinateurs personnels (1990), cassettes vidéo et audio (1993), film (1995), et internet (2002).

L’approche de François, cependant, diffère quelque peu de celle de ses prédécesseurs. Bien qu’il ait fait référence à diverses technologies dans ses messages, elles sont souvent secondaires à son attention plus délibérée sur les problèmes sociaux sous-jacents dans les communications. La théologienne Katherine Schmidt soutient que François semble avoir “Propensions Luddites,  » notant par exemple que ses deux références à l’internet dans le message de miséricorde de semblent être cloués ou étrangers. Même ce message le plus récent fait référence aux podcasts et aux réseaux sociaux, mais ce sont plus des points de côté dans le texte que des points de fond.

Pris dans leur ensemble, les messages précédents de François pour la Journée Mondiale des Communications sociales se sont généralement concentrés sur trois thèmes principaux. Premièrement, lorsqu’il s’occupe des technologies, il se préoccupe surtout de la façon dont elles peuvent à la fois rassembler les gens et les séparer. Dans son premier message en , il a cherché à promouvoir une « culture de la rencontre“ qui comprenait d’être de bons samaritains sur les ”autoroutes numériques » du monde. Pourtant, même ici, il souligne que « la communication est finalement une réussite humaine plutôt que technologique.” Dans son message 2019 s’est concentré sur les réseaux sociaux, il note que si ces plateformes peuvent “nous aider à mieux nous connecter, à nous redécouvrir et à nous entraider”, elles facilitent également la pratique abusive de la cyberintimidation.

Deuxièmement, afin d’encourager les possibilités positives de connexion, il souligne les vertus et les attitudes qui devraient guider l’engagement d’une personne avec les technologies de communication. Il note à plusieurs reprises le besoin de respect et d’amour dans le cadre de la posture que l’on devrait avoir envers ceux que l’on rencontre en ligne. Dans le cadre de son Année de la Miséricorde, son message de affirmait que “Seules des paroles prononcées avec amour et accompagnées de douceur et de miséricorde peuvent toucher nos cœurs pécheurs.” En 2018, il est entré dans le débat public autour de la désinformation et des « fausses nouvelles », soulignant comment le vice de la cupidité peut éloigner un engagement à dire la vérité dans l’amour.

Troisièmement, François a toujours souligné que ”l’écoute » était peut-être la plus essentielle de ces vertus dans la communication sociale. Il exhorte fréquemment ses lecteurs à être ”véritablement attentifs à l’écoute des autres“ (), car « Écouter signifie prêter attention, vouloir comprendre, valoriser, respecter et réfléchir à ce que l’autre dit.” (). François considère l’écoute comme un élément indispensable de toute communication humaine authentique. De plus, c’est un élément qui, craint-il, fait constamment défaut dans les relations humaines, qu’elles soient médiatisées par des moyens numériques ou autres.

Ces trois thèmes sont présents en abondance dans son message 2022 pour la Journée mondiale de la Communication. Il décrit l’écoute comme “ une dimension d’amour « , nécessaire pour être “ en relation avec les autres et avec l’Autre. »C’est un refus d’écouter, parfois exprimé comme un rejet, parfois comme une manipulation de ce que dit l’autre, et parfois comme une simple attente de sa propre occasion de monologue, qui favorise la division et la séparation. De plus, Francis souligne que l’écoute nécessite de la patience et du risque, car on se met en position d’être surpris par l’expérience et les idées d’un autre. Fondamentalement, l’écoute prend du temps et résiste à l’impulsion technocratique d’avoir des solutions rapides ou des astuces de vie pour des situations difficiles.

L’approche de Francis à l’écoute rejette implicitement l’affirmation selon laquelle l’écoute est simplement un mot à la mode vide, pertinent uniquement dans une culture managériale corporatiste. Il fonde plutôt son sens de l’écoute dans la révélation de la relation divine-humaine dans les Écritures. Il note à la fois que Dieu appelle les êtres humains à écouter, comme exprimé dans le Shema Israël prière (qui ouvre « Écoute, Israël: Le Seigneur est notre Dieu, le Seigneur seul! »”, et cela « incline son oreille » à écouter les prières et les préoccupations de l’humanité.

En outre, il souligne les récits bibliques de l’échec à écouter, tels que ceux qui “se sont couverts les oreilles” pour éviter la proclamation de l’Évangile par Étienne dans Actes 7, et comment de tels échecs sont en fait des échecs humains à aimer. L’accent mis par François sur l’écoute dans ce texte reprend son homélie de la messe d’ouverture du « chemin synodal » en octobre. Là, tout en réfléchissant à l’histoire du jeune homme riche dans l’Évangile de Marc, François caractérise l’approche de Jésus comme celle de la rencontre, de l’écoute et du discernement. Dans cette homélie, François souligne la nécessité de prendre le temps d’écouter et de parler honnêtement et avec intégrité, afin “ d’éviter les réponses artificielles, superficielles et préemballées.” Dans le message plus récent, il note qu’une telle ouverture peut  » se permettre d’être surpris par la vérité, ne serait-ce qu’un fragment de vérité, dans la personne que nous écoutons.”

Réfléchissant au défi du pluralisme chrétien, le théologien Hans Urs von Balthasar a écrit dans La vérité est symphonique cela, “le but de son pluralisme est le suivant: ne pas refuser d’entrer dans l’unité qui réside en Dieu et qui est communiquée par lui, mais symphoniquement se mettre en harmonie les uns avec les autres et prêter allégeance à l’unité transcendante. »Sur cette image, Balthasar ne voit pas de place pour un public passif, non-joueur; tous sont des musiciens appelés à jouer ensemble.

Avec son dernier message sur les communications sociales, le Pape François reflète cette vision balthasarienne en mettant l’accent sur l’écoute: “Avec la conscience que nous participons à une communion qui nous précède et nous inclut, nous pouvons redécouvrir une Église symphonique, dans laquelle chaque personne est capable de chanter de sa propre voix, en accueillant les voix des autres comme un don pour manifester l’harmonie du tout que l’Esprit Saint compose.” La multitude des voix, les fragments réunis peuvent devenir une symphonie, une harmonie obtenue par la polyphonie.